Candice Van der Elst, consultante et formatrice chez Highlight Consulting, nous apporte des éléments de réponse pour favoriser l’engagement lors des formations en entreprise. Un sujet qui fait écho à notre article “8 façons de maximiser un programme de formation”.
Candice, pourquoi l’engagement est-il si crucial dans le processus d’apprentissage en entreprise ?
L’engagement est bien plus qu’une simple participation. Une personne investie dans son apprentissage est non seulement plus attentive, mais aussi plus encline à appliquer ce qu’elle a appris. L’engagement se traduit par une meilleure rétention de l’information, un développement accru des compétences, et une mise en pratique directe de ce qui a été appris dans leur travail quotidien.
Comment définissez-vous cet engagement ? Quels en sont les éléments clés ?
J’aime bien la définition d’Elisabeth Barkley, Docteur de l’université de Utah qui considère que l’engagement est la combinaison de la motivation et de l’apprentissage actif (qui implique une participation ET une réflexion sur son propre mode de fonctionnement).
Quelles sont les difficultés que vous rencontrez pour assurer cet engagement ?
Dans un monde où la capacité de concentration est en baisse, garder les participants actifs et engagés sans tomber dans des clichés peut ressembler à un marathon dans le désert avec un dénivelé de 900 mètres. (rire)
Il faut un cadre clair, un contenu précis, une pédagogie active et un formateur expérimenté maîtrisant les techniques d’apprentissage actif allant des plus simples aux plus complexes :
Lors de formations en groupe et en présentiel, les méthodes de pédagogie active sont toujours “compliquées” (selon ce modèle d’Elisabeth Barkley). Elles demandent un temps de préparation avant la formation pour garantir le lien entre les besoins concrets des apprenants et les expériences proposées : jeux de rôles, apprentissage par investigation, expérimentations, cas pratiques,…
Ces méthodes sont exigeantes car elles se déploient ‘dans l’émergence’, à partir de ce qui se passe ‘ici et maintenant’ au sein du groupe. Le formateur doit constamment adapter sa posture, partir de ce que les participants savent et ont envie de découvrir, proposer des exercices sur mesure, identifier les outils ou modèles les plus pertinents, quel que soit le niveau de connaissance ou de compétence des personnes présentes.
Pourriez-vous nous détailler quelques outils utilisé en pédagogie active ? Quel est leur impact ?
Personnellement, j’utilise souvent le co-développement, les jeux de Thiagi, le sketchnoting et les jeux de rôle. Ce sont quatre approches complémentaires intéressantes.
Jeux de Thiagi : Ces jeux, développés par Sivasailam “Thiagi” Thiagarajan, sont interactifs et visent à favoriser l’apprentissage expérientiel. Ils augmentent l’engagement des participants en créant une atmosphère de groupe dynamique qui encourage la coopération et la communication. Leur succès dépend toutefois d’une planification minutieuse et d’une animation compétente.
Sketchnoting : Cette technique de prise de notes visuelle, qui combine dessins, schémas et mots-clés, est particulièrement efficace pour stimuler la créativité et améliorer la rétention des informations. Bien qu’elle puisse prendre plus de temps que les notes traditionnelles, elle est ludique et engageante, surtout pour les participants à l’aise avec le dessin.
Co-développement : Aussi appelé intervision, le co-développement repose sur l’échange d’expériences entre pairs pour résoudre des problèmes concrets. Cette méthode favorise le partage de connaissances, renforce les compétences de résolution de problèmes, et améliore l’efficacité professionnelle.
Jeux de rôle : Ces exercices immersifs permettent aux participants de pratiquer activement des compétences, notamment sociales, dans un cadre sécurisé. Ils sont particulièrement utiles pour développer l’empathie et la communication, mais nécessitent une préparation minutieuse pour créer des scénarios pertinents.
Il y a malheureusement peu d’études quantitatives sur l’impact de ces différentes techniques. On trouve plutôt des retours qualitatifs sur leur efficacité. Sur la base de mon expérience et d’échanges avec d’autres formateurs, je n’ai pour ma part aucun doute sur leur efficacité. L’énergie au sein du groupe est positive, les participants sont engagés, les retours en fin de parcours sont unanimes.
Comment choisir ?
Le choix de la méthode dépend des objectifs spécifiques de la formation, du niveau de maturité du groupe et de la préférence des participants. Il est important que le·la formateur·rice prépare le contenu sur base des besoins du public cible et du contexte et qu’il reste ensuite flexible pendant la session. Il faut trouver l’équilibre entre une approche à la fois pertinente et engageante pour les participants.
Qu’en est-il de la version en ligne ? Peut-on intégrer ces méthodes dans un format virtuel ?
Ces méthodes peuvent tout à fait s’appliquer en ligne. Elles font souvent la différence car les formats en ligne mettent de facto les apprenants dans un rôle plus passif. Toutes ces méthodes peuvent être déployées grâce aux nouveaux outils digitaux (Teams, nuages de mots, questionnaires live, chats, sous-groupes virtuels, plateformes de travail collaboratives). Par contre, ce sont les formules qui demandent le plus de préparation en amont car la mise en place de tous ces outils digitaux est chronophage (sélection de l’outil le plus pertinent, techniques d’animation, briefing des utilisateurs, etc.). Aussi, elles ne s’appliquent qu’aux formations synchrones (c’est-à-dire, tous en ensemble dans la même session). Pour les formations asynchrones (chacun à son rythme devant son ordinateur de façon individuelle), elles ont peu de valeur ajoutée ou ne sont tout simplement pas possible à mettre en œuvre.
Quel message auriez-vous envie de faire passer aux organisations qui cherchent des formations engageantes ?
Pour garantir l’engagement des participants, on a besoin de la motivation et de l’apprentissage actif. Et l’un peut influencer l’autre ! Si le·la formateur·rice maîtrise plusieurs techniques d’apprentissage et s’adapte au groupe, il·elle garantit le succès de la formation. Il·elle sent l’énergie du groupe et crée un environnement favorable à la pédagogie active. Il sera d’autant plus libre et impactant que son intervention aura été bien conçue et préparée par le mandataire.
La communication sur les objectifs de la formation joue également un rôle important. Informer les participants sur la façon dont le suivi sera assuré, notamment par la hiérarchie, est aussi très engageant.
Enfin, si le·la formateur·rice sait quelles sont les opportunités de pratique des apprenants dans le quotidien, il·elle peut renforcer encore la motivation en donnant du sens à l’apprentissage.
Et dernier petit clin d’œil non négligeable, le lieu ! Il est intéressant de noter que l’espace dans lequel les apprenants évoluent joue beaucoup sur la dynamique qui s’installe au sein du groupe et sur la qualité de l’expérience.